La Biodiversité, garant de notre bonheur
DOI:
https://doi.org/10.4314/176Abstract
Dans un monde où les seuls choix, imposés par une soif d’idéal artificiel et rationnel, sont de se développer ou de mourir, Madagascar doit impérativement prendre suffisamment de recul pour mieux sauter vers l’avenir. Un recul peut-être perçu comme un geste de retrait, de lâcheté mais pourrait aussi être un élan de sagesse qui exprimerait une réflexion et la lecture d’un parcours destiné à préparer les stratégies de mise en oeuvre, d’identification et de gradation des objectifs contribuant au vrai développement du pays. Malheureusement, notre siècle ne fait pas exception aux autres en contribuant à la tendance vers la rareté des ressources naturelles. Cette tendance se manifeste par une compétition de plus en plus directe entre les ressources naturelles renouvelables et celles qui ne le sont pas. Des choix sont à faire entre la sauvegarde des espèces et l’exploitation des richesses du sous-sol comme c’est le cas pour les sources d’énergie. Mais la question qui se pose est de savoir si nous avons vraiment le choix ; c’est une question à laquelle il est très difficile de répondre. Conformément à la définition du développement durable donnée par le premier ministre norvégien il y a plus de vingt ans, peut-on considérer que la valeur des ressources exploitées prenne en compte l’amortissement destiné aux investissements nécessaires aux générations futures ? Dans ce combat entre la protection des espèces et l’exploitation des ressources, qui sera le premier à mettre la biodiversité au tapis ? Le développement ou la pauvreté ? Pour Madagascar, l’enjeu est assez délicat car désormais chacun est invité à réfléchir de façon active sur la meilleure façon de préparer l’avenir. Dans ce contexte, la participation par les publications peut être légitimement considérée comme un investissement pour le futur développement de Madagascar. Mais quel développement ? C’est justement ce qu’il faut identifier et définir avec une grande prudence et avec fermeté. Car il nous faut des références et des traces pour constituer une ligne de tendance franche à adopter, accepter et transmettre de génération en génération. La publication des résultats de recherche dans tous les domaines peut être considérée comme la pierre d’achoppement de l’échafaudage d’une telle armature. Par ignorance ou en connaissance de cause, on nous dit à nous Malagasy, que nous sommes riches mais aussi très pauvres. Face à un tel paradoxe, la fierté devra se placer par rapport à une certaine valeur de référence. Mais à part la valeur économique, quel autre type de valeur peut-on considérer ? Il est donc important de se rappeler que par la rédaction de nos travaux dans une publication de référence, nous nous engageons à contribuer à définir les diverses valeurs des ressources que nous léguons à l’humanité. Nous assistons déjà à la croissance continue des valeurs des diversités moléculaires, génétiques et morphologiques, et actuellement, ceux qui sont conscients des risques inhérents au changement climatique commencent aussi à accorder une importance ‘économique’ aux services d’intérêt général offerts par les écosystèmes. Jusqu’ici, on peut dire que la nature a pris soin des Malagasy. Il est temps de renverser la tendance et dire que le temps est venu pour les Malagasy de prendre soin de la nature. À l’image d’un enfant, devenant adulte, qui va témoigner sa reconnaissance à ses parents. Les visiteurs passant à Madagascar sont souvent étonnés de la résignation de la population par rapport à la pauvreté. On dit souvent que les Malagasy sont pauvres mais heureux. Est-ce que c’est possible ? La réponse peut-être oui dans le sens ou malgré la pauvreté économique du pays sa richesse biologique arrive encore à rendre les gens heureux pour vivre au jour le jour. En coupant un arbre, en pêchant, en vendant les orchidées sauvages, et la liste est longue, les Malagasy arrivent encore à afficher un sourire. En suivant la tendance, il se peut alors que le bonheur des Malagasy se dégrade de jour en jour avec la détérioration de son patrimoine naturel. Pour terminer, après une quinzaine d’année de travaux de recherches sur le terrain dans différentes régions de Madagascar, il n’est peut être pas si prétentieux d’affirmer que l’identité du pays est étroitement lié à sa biodiversité. Que ce soit dans la vie ou dans la mort, dans la joie ou dans le malheur, en ville ou en brousse la plupart des Malagasy retournent toujours vers la nature pour se réfugier. Le vrai développement du pays dépendra en grande partie de la prise de responsabilité conjointe vis-à-vis du respect de l’environnement. Si l’écosystème reste encore la plus grande entreprise qui fait vivre la majorité des Malagasy, il nous appartient de faire en sorte que cette entreprise qui porte notre futur ne connaisse pas la faillite. C’est avec une grande humilité que j’ai essayé d’écrire cette préface en espérant que je peux stimuler des inspirations en faveur de notre entreprise du futur qu’est « La Biodiversité ».
Biodiversity, guarantor of our happiness
In a world where the only choices, imposed by a thirst for an artificial and rational ideal, are to develop or to die, Madagascar must step back sufficiently in order to prepare for the future. Although stepping back may be perceived as a gesture of retreat or cowardice, it may also be considered a strategy which expresses the reflection of a path destined to prepare for the identification and implementation of strategies contributing to the country’s true development. Unfortunately, our century is no exception when it comes to the decline of natural resources. This trend manifests itself through increasing direct competition between renewable and non - renewable natural resources. Choices must be made between safeguarding species and the exploitation of the Earth’s wealth below its surface, as is the case for the majority of energy sources. However the question is whether we are entitled to the choice, a difficult question to answer indeed. In accordance with the definition of sustainable development offered by the Norwegian Prime Minister more than 20 years ago, can we consider that the value of exploited resources takes into account the amortization destined for the investments necessary for future generations? In this battle between the protection of species and the exploitation of resources, which will be the first to knock-out biodiversity? Development or poverty? For Madagascar, the stakes are delicate because henceforth everyone is invited to contemplate the best way to prepare for the future. In this context, participation from publications may be legitimately considered as an investment for the prospective development of Madagascar. And which development? This is precisely what requires identification and definition with great caution and resolve. This is because we need guidelines to form a line of approach which can be adopted and delivered from generation to generation. The publication of research results in all fields may be considered as the basis for such a construct. Through ignorance or shrewdness, we Malagasy are told that we are rich and yet also very poor. In the face of this paradox, pride will have to be placed in relation to a certain value of reference. Apart from economic value, what other value might we consider? It is thus important to remind oneself that through writing our work in a reference publication, we engage ourselves in the contribution of defining the diverse values of resources that we leave behind for humanity. We are already witnessing the increasing value of molecular, genetic and morphologic diversity. Now those who are conscious of the inherent risks of climate change are also beginning to assign ‘economic’ importance to the services offered by ecosystems. We can say that until now, nature has cared for the Malagasy. It is time to reverse this trend and say that the time has come for the Malagasy to take care of nature – like an image of a child growing into adulthood, expressing gratitude towards his or her parents. Visitors to Madagascar are often surprised by the population’s resignation towards poverty. We often say that the Malagasy are poor yet happy. Is this possible? The answer could well be yes in the sense that although the country may be financially poor, the biological richness affords enough happiness live from day to day. Through the cutting of a tree, fishing, selling wild orchids, and the list is long, the Malagasy are still able to smile. Consistent with this trend, the Malagasy’s happiness could decrease day by day with the deterioration of his or her natural heritage. In conclusion, after some 15 years of field research in different regions of Madagascar, it may not be so pretentious to state that the country’s identity is closely knit to its biodiversity. Whether in life or in death, in happiness or in sadness, in the city or in the bush, most Malagasy always return to nature for refuge. The country’s true development will depend on a partnered responsibility to respect the environment. If the ecosystem still remains the largest enterprise which allows the majority of the Malagasy to make a living, it belongs to us to make sure that this enterprise, which carries our future, does not fail commercially. It is with great humbleness that I attempted to write this preface in the hope that I can stimulate inspiration in favor of our future enterprise, ‘Biodiversity’.
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